1768-1806 : du transfert à Nancy à la disparition de l’Université
La lutte entre Nancy et Pont-à-Mousson
Musée des Beaux Arts de Nancy
En 1737, François III de Lorraine échange ses terres contre la Toscane. La Lorraine est alors donnée à Stanislas Leszczynski, roi détrôné de Pologne et beau-père de Louis XV.
Assurés du soutien de Stanislas, les Jésuites de Pont-à-Mousson mènent une politique de reconstruction et d'agrandissement de l'Université. Le Collège et les facultés des Arts et de Théologie comptent encore à cette époque 350 élèves, le Droit et la Médecine entre 80 et 100.
Cependant, la cité ducale étant en plein essor, l’élite nancéenne souhaite doter la ville d’un centre universitaire. Stanislas, poussé par les détracteurs de Pont-à-Mousson, crée donc un Collège Royal de Médecine à Nancy en 1752. Les locaux sont installés dans l’actuel musée des Beaux Arts. Ce collège donne des cours de botanique, de chirurgie et d’anatomie ; sa notoriété devient rapidement supérieure à celle de la faculté de Pont-à-Mousson. Par la suite, Stanislas associe au Collège des classes de philosophie, de mathématiques, d’histoire et de géographie. Dès lors, une vraie faculté des Arts se crée, sans en porter le titre, devenant la rivale de Pont-à-Mousson.
Les médecins de Nancy mènent contre leurs confrères de Pont-à-Mousson une campagne acharnée : le Collège reproche à la Faculté la faiblesse et l’insuffisance de son enseignement. La rivalité entre les deux Universités donne lieu à de nombreuses intrigues. Par exemple, en 1758, un médecin de Pont-à-Mousson est accusé par le Collège de Médecine de Nancy d’avoir, par ignorance, causé la mort d’un professeur du Collège des Jésuites, et d’avoir donné des soins inexpérimentés. Ce n’est en réalité qu’un prétexte pour accuser la Faculté d’avoir décerné, un peu à la légère, le droit d’exercer à un candidat. Selon les détracteurs, de pareilles erreurs ne se renouvelleraient plus si l’Université était à Nancy.
1768 : le transfert de l’Université à Nancy
Bibliothéque de nancy
Stanislas, âgé, laisse aller les choses. Il sait qu'à sa mort, la Lorraine deviendra française, et que l'édit de suppression qui frappe les Jésuites en France, sera étendu à ses terres. Le 23 février 1766, le roi Stanislas meurt et le corps municipal de Nancy profite de l’expulsion des Jésuites (en juillet 1768) pour renouveler sa demande. Le 3 août 1768, Louis XV ordonne donc le transfert de l'Université de Pont-à-Mousson à Nancy.
Afin de dédommager Pont-à-Mousson d’avoir perdu l’Université, le gouvernement royal y installe en 1776 une des écoles royales militaires que le secrétaire d’Etat de la guerre vient de créer.
Néanmoins, rien n’est prévu pour accueillir l’Université à Nancy, les locaux manquant, les facultés sont dispersées dans la ville. La faculté des Arts et celle de Théologie s’installent dans les bâtiments de l’ancien noviciat des Jésuites. Pour les facultés de Droit et de Médecine, on fait construire, par l’architecte Charles-Louis de Montluisant, un vaste immeuble : le Palais de l’Université (l’actuelle Bibliothèque Municipale) achevé en 1778. L’aile gauche accueille les locaux de la faculté de Médecine et l’aile droite, la faculté de Droit. Les dimensions du bâtiment et la disposition des fenêtres sont calculées pour y mettre les boiseries de la bibliothèque des Jésuites de Pont-à-Mousson. On y installe les livres de la bibliothèque que Stanislas a créé en 1750.
Cependant, l’Université ne rencontre pas le succès escompté.
1793 : la disparition des universités
Bibliothéque de nancy
A la fin de l’année 1793, la Constituante, gouvernement héritier de la Révolution Française de 1789, met fin à l’Université de Nancy, comme à toutes les autres en France, pour faire table rase du passé. En effet, elle considère que le niveau d'enseignement y est faible, que c’est une institution très conservatrice car largement dominée par les congrégations religieuses, et que seul un corps de privilégiés y a accès.
Toutefois, le gouvernement n’organise pas de nouvel enseignement supérieur. Il crée seulement des grandes écoles pour former les cadres de la nation comme l’Ecole des Mines, Polytechnique, établies à Paris.
La liberté de l’enseignement est rétablie en mars 1794, mais les décrets de 1795 ne recréent pas l’université. Elle est remplacée par les écoles centrales à raison d’une par département pour les élèves de onze à dix huit ans. Les meilleurs élèves peuvent ainsi accéder à des écoles spécialisées groupées à Paris.
A Nancy, quelques érudits tentent d’animer une ville qui se meurt intellectuellement :
les médecins de Nancy fondent en 1796, une Société de santé qui a pour but de faire revivre les anciennes institutions universitaires disparues ;
la suppression de la faculté de Médecine a des conséquences déplorables : le nombre de médecins et des chirurgiens diminue, tandis que celui des charlatans s’accroît. Les médecins de Nancy décident de former une école libre de médecine dès 1797. En 1822, elle devient « école secondaire de médecine », puis en 1843 une école préparatoire ;
Thieret, professeur de législation, dispense en 1801 un cours de droit libre et gratuit.
Un nom, une rue… Stanislas Leszczynski (1677-1766), roi de Pologne, duc de Bar et de Lorraine
Stanislas Leszczynski
Il est roi de Pologne de 1704 à 1709 et de 1733 à 1736 sous le nom de Stanislas Ier. Et c'est en 1737 qu'il reçoit les duchés de Lorraine et de Bar qui reviendront à la France à sa mort. Il installe plusieurs résidences royales (La Malgrange, Commercy, Jolivet et Einville) et fait transformer le château de Lunéville surnommé le petit Versailles.
À Nancy, Stanislas a peu de pouvoir, il va donc chercher à marquer l'histoire en entretenant une cour brillante et par des mécénats. Il crée la Bibliothèque royale de Nancy (en 1750), et la Société royale des Sciences et des Belles-Lettres. Dans ses États, il met en place des initiatives sociales en avance sur son temps : écoles, hôpitaux, bibliothèques…
Il transforme sa capitale, Nancy, pour la doter de la place Royale, créée en l'honneur de Louis XV (l’actuelle place Stanislas). Cette place est entourée d'immeubles de l’architecte Emmanuel Héré, et close de grilles dorées, de Jean Lamour.
Le centre de la place est occupé depuis 1831 par une statue de Stanislas, qui a remplacé celle de Louis XV, enlevée sous la Révolution.