1572-1768 : l’ère mussipontaine
1558 : prémisse d’une université en Lorraine : Verdun
Nicolas Psaume, évêque de Verdun et participant au Concile de Trente, crée en 1558 une université à Verdun, appelée « Orphanotrophe », puisque 24 places d’étudiants y sont réservées à des orphelins. Cette université a des débuts brillants : on y enseigne la Théologie, la Philosophie, les Belles-Lettres, le Droit, la Médecine. Mais sa durée est brève puisqu’elle doit, faute de ressources, cesser son enseignement dès 1565. Elle est relayée en 1570 par la création d’un collège ouvert à tous.
1572 : la première Université de Lorraine à Pont-à-Mousson
La création de l’Université de Pont-à-Mousson
Charles III, Duc de Lorraine
L’idée de créer une université lorraine revient à l’association du Duc Charles III, et de son cousin le Cardinal de Lorraine-Guise, qui souhaitent :
- créer un centre intellectuel pour limiter la fuite de la noblesse qui va parfaire ses études dans les pays voisins. En effet, les Universités de Paris, Cologne, et Bologne attirent un grand nombre d’étudiants ;
- créer un noyau de résistance contre l’avancée protestante venant des terres voisines ;
- faire appliquer les principes du Concile de Trente (1542-1563) qui prônent une meilleure formation pour les prêtres et réfutent les thèses protestantes.
Ils choisissent d’installer l’Université à Pont-à-Mousson, puisque la ville est à égale distance des trois cités épiscopales (Toul, Verdun, Metz) et de la cité ducale de Nancy. De plus, à cette époque, Pont-à-Mousson est en plein essor économique car elle se situe sur la Moselle qui draine le commerce de toute la province.
Une fois le lieu d’installation trouvé, le Cardinal de Lorraine-Guise sollicite le Pape Grégoire XIII. Ce dernier érige canoniquement l’université de Pont-à-Mousson par la bulle In Supereminenti, le 5 décembre 1572. Cette bulle précise que le soin d’établir une université «pour dissiper le brouillard ténébreux de l’ignorance et la peste des hérésies» est confié aux Jésuites.
La mise en place progressive de l’Université
L'Université de Pont-à-Mousson
Les Jésuites prennent la direction de l’Université qui est composée de quatre facultés : les Arts, la Théologie, la Médecine, et le Droit.
En novembre 1574, la faculté des Arts est ouverte, celle-ci comporte quatre chaires : la logique, la métaphysique, la physique et les mathématiques.
L’année suivante, la faculté de Théologie commence à fonctionner. Elle possède également quatre chaires : la théologie scolastique, la théologie morale, l’écriture sainte et la langue hébraïque.
En 1578, le premier cours de droit est dispensé, mais la faculté de Droit n’est complètement organisée qu’en 1582 par Grégoire de Toulouse. Elle comprend quatre chaires : l’institues, le droit canonique, le droit romain et le droit coutumier.
Quant à la faculté de Médecine, les cours ne débutent qu’en 1592, et l’installation définitive n’a lieu que six ans plus tard. On y donne des cours d’anatomie, de médecine générale, de chirurgie et de pharmacie. De plus un jardin botanique servait à l’étude des plantes.
Ainsi l’Université de Pont-à-Mousson a reçu tous ses organes à la fin du XVIème siècle.
Le succès de l’Université de Pont-à-Mousson
L'Université de Pont-à-Mousson
La réputation de l’Université s’étend rapidement en dehors des frontières du duché. Elle acquiert une renommée internationale. Le nombre d’étudiants inscrits témoigne de sa notoriété puisqu’il passe de 400 en 1575 à 2 000 en 1607. A cette date l’Université fait concurrence à la Sorbonne. Sa réussite est surtout due à la qualité de ses enseignements et surtout de ses professeurs.
En effet, l’Université de Pont-à-Mousson a toujours eu un corps professoral d’hommes éminents. On peut notamment citer Pierre Grégoire de Toulouse, Jean Hay, Léonard Perrin.
A cette époque, l’imprimerie devient vite un instrument indispensable à ce monde scolaire. Un centre d’édition très actif se crée à Pont-à-Mousson. En effet, les Jésuites donnent une place prépondérante aux livres dans la pédagogie contrairement aux universités traditionnelles où tous les cours sont dictés.
Les difficultés de l’Université de Pont-à-Mousson
Au XVIIème siècle, l’Université connaît un déclin en raison d’une succession d’événements :
- la création de nombreux collèges Jésuites : à Nancy (1616), à Metz (1622), à Saint Nicolas de Port (1629) et à Epinal (1632) ;
- la concurrence des Universités de Strasbourg, de Reims et de Paris ;
- l’épidémie de peste de 1630 qui touche de nombreux élèves et professeurs ;
- la guerre entre Richelieu et le duc Charles IV de Lorraine qui engendre une grande famine ;
- la guerre de Trente ans (1618-1648) qui entraîne l’annexion de l’Alsace-Moselle sous l’autorité du roi de France. Celui-ci favorise l’Université de Strasbourg plutôt que celle de Pont-à-Mousson. Ce n’est qu’en 1697, avec le traité de Ryswick, que le duc Léopold de Lorraine reprend possession de ses Etats et essaye sans grand succès de rétablir le prestige de l’Université.
L'Université, amoindrie, ne retrouvera jamais son effectif d’étudiants.
Certains étudiants viennent à Pont-à-Mousson pour se distraire, et non pour suivre les études payées par leurs parents. Après le meurtre d’un bourgeois par un étudiant turbulent, Charles III interdit aux étudiants le port de la dague ou de l’épée, quel que soit leur rang social.
Un nom, une rue… Charles III (1543 – 1608), duc de Bar et de Lorraine.
Rue Charles III, Nancy
En 1545, à l’âge de deux ans, Charles III succède à son père (François Ier de Lorraine). La régence est confiée à son oncle, évêque de Metz et de Verdun, ainsi qu’à sa mère. Il est élevé à la cour de France et rentre à Nancy en octobre 1559.
La Lorraine étant un duché indépendant, Charles III tente de maintenir une stricte neutralité entre la France et l’Empire germanique.
Il s'abstient longtemps de prendre une part active aux guerres de Religion : il lutte d'abord contre le protestantisme en douceur, en créant l'Université de Pont-à-Mousson. Ensuite, il s’engage dans la Ligue catholique pour combattre le possible avènement d’un protestant au trône de France, Henri de Bourbon (futur Henri IV). Lui-même prétend à la succession au trône de France, sa femme Claude étant la fille du roi de France, Henri II. Cependant, à l'arrivée du roi Henri IV au trône, Charles III s'allie à lui.
Malgré les guerres de Religion, son règne est une époque de prospérité et d'essor. En 1590, il agrandit Nancy, créant de toute pièce la Ville Neuve, et fait porter le chardon sur son blason.